La Vie durant l’hiver au Ladakh :
L’hiver, l’atmosphère, le paysage et le froid incitent à vivre suivant un rythme beaucoup plus lent. La majeure partie des tâches est dédiée au bétail : il faut sortir les bêtes au soleil, nettoyer les étables, faire sécher les excréments contre la pierre pour en faire du combustible, amener boire le bétail à la rivière, distribuer le fourrage, traire, etc.
Pour les parents, la journée commence au lever du jour. La mère fait du feu, prépare la première soupe d’orge. Le père va préparer les rations de fourrage tout en priant, tandis que les enfants restent au chaud sous la couverture familiale.
Dès les grands froids, tout le monde dort dans une même pièce d’hiver, souvent au rez-de- chaussée car elle est enfouie dans la maison et entourée de toutes parts par les étables. Parfois cette pièce n’a aucune fenêtre mais seulement une petite ouverture au plafond permettant l’aération et l’entrée d’un peu de lumière. La pièce d’hiver reste assez obscure et enfumée, on y accède en passant à talons par les étables et il est fréquent de devoir franchir 5 à 6 portes pour y arriver. Les portes sont nombreuses, très basses et étroites pour se protéger du froid extérieur, ainsi dans cette pièce, chauffée par les étables et le poêle à cuisine, la température peut atteindre de +3°C à +10°C, lorsqu’il fait jusqu’à -30°C dehors. Quand le soleil est au zénith et le froid moins intense, la famille sort se réchauffer. Assise contre le mur exposé au Sud, elle passe là tranquillement les deux premières heures de l’après-midi. Les pierres reflètent la chaleur du soleil et il peut faire +5°C contre ce mur, alors que de l’autre côté, à l’ombre, il fait -20°C.
Chacun s’occupe suivant ses inspirations : Hommes et femmes cousent, filent, lavent, boivent du Tchang (la bière d’orge), discutent paisiblement ou prient, tandis que les enfants jouent entre eux, taquinent les bêtes, apprennent à lire ou à prier. Instants privilégiés, rares moments de réelle détente, harmonie faite de tranquillité, de chaleur humaine et de gestes mille fois répétés avec la grâce des mains agiles ; la famille connaît ici des moments de bonheur qui apparaissent comme une symbiose parfaite entre l’homme et la nature.
Dès la fin de l’après-midi, il faut à nouveau nourrir les bêtes, les abreuver, les rentrer avant le froid intense du crépuscule. Le soir, la mère prépare le repas tandis que l’homme prie. La nourriture est à base de farine d’orge principalement, de farine de pois ou de blé, que l’on cuisine sous forme de pâte ou de galettes. Chaque moment de la journée est accompagné de thé, avec beaucoup de beurre salé pour aider à lutter contre le froid. Le lait, de dzo ou de chèvre, est précieux, car le bétail n’en fournit qu’une maigre quantité, qui est partagée entre les plus jeunes enfants.
Festivités hivernales au Ladakh :
L’hiver les réunions entre voisins sont très fréquentes, surtout avant et après le Losar : le nouvel an tibétain. Le Losar est célébré au Ladakh et au Zanskar deux mois plus tôt qu’au Tibet. En effet, la légende veut qu’un roi Ladakhi, contraint de partir en guerre et craignant ne pas être rentré à temps pour le Losar, préféra avancer les festivités de deux mois. Dès le jour de l’an, les soirées arrosées de Tchang commencent et ne finiront qu'à l’épuisement des réserves de grain. Voisins et amis s’invitent pour boire, prier, discuter et ce regain de vie permet d’oublier les rigueurs de l’hiver. La fête traditionnelle du Losar n’est pas une fête religieuse, elle est haute en couleur mais avant tout un moment de ferveur populaire, un peu à l’image du nouvel an occidental qui d’ailleurs lui fait suite directement cette année 2011.
L’hiver concentre aussi la période des festivals monastiques : Perché rive gauche de l’Indus le monastère de Matho, prépare pendant de longs mois avec soin son festival qui a lieu chaque début d’année. A cette occasion deux déités prennent possession de deux moines entrant dans une impressionnante transe.